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21mar22
Sahara occidental : Madrid change de camp
Retournement d'alliances à Madrid. L'Espagne traditionnellement proche de l'Algérie a décidé de renforcer ses liens avec le Maroc, au risque de mécontenter son fournisseur de gaz. Un communiqué du gouvernement de Pedro Sánchez, vendredi soir, a scellé sa réconciliation avec Rabat et son alignement sur les propositions marocaines concernant l'avenir du Sahara occidental. Le ministre des affaires étrangères, José Manuel Albares, a indiqué que le plan « d'autonomie » dessiné par Rabat était « la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution du différend ». Il renonce de fait à défendre le droit à l'autodétermination et une solution négociée avec les Sahraouis.
Cet exercice de realpolitik qui rapproche Madrid des positions françaises crée la stupeur en Espagne. Il répond aux pressions des Américains qui avaient déjà convaincu en janvier le gouvernement allemand de prendre ses distances par rapport aux revendications du front Polisario.
Grand fournisseur de gaz
L'Espagne peut-elle se permettre d'ouvrir une ligne de front contre son grand fournisseur de gaz ? Pedro Sánchez vient de rompre, sans préavis ni débats ou consultations, avec la ligne politique tracée par Madrid depuis plus de 45 ans.
La question du territoire saharien, ancienne colonie espagnole, est passée en arrière-plan sur la scène internationale. Mais elle demeure très sensible en Espagne où la gauche est particulièrement impliquée dans la coopération, l'accueil d'enfants et les échanges culturels avec les réfugiés sahraouis. Le malaise est palpable aujourd'hui. Podemos et les autres partis de gauche réclament des explications, tandis que certains évoquent la « trahison du peuple sahraoui ».
C'est la fin d'une longue période de froid avec Rabat, qui avait retiré son ambassadrice à Madrid en mai 2021, en protestations contre l'hospitalisation en Espagne du leader du Front Polisario , Brahim Ghali, malade du Covid. Le Maroc avait alors rappelé son rôle stratégique à la frontière sud de l'Europe comme rempart contre l'immigration. Quelques brefs épisodes d'arrivée massive de migrants, aux Canaries ou encore à Ceuta ou Melilla, ont suffi à faire comprendre ce qui se passerait si Rabat cessait de coopérer en matière de contrôle des flux migratoires ou de lutte contre le terrorisme.
Madrid a tenté jusque-là de préserver un équilibre fragile entre ses deux voisins du sud. Mais aucune solution simple ne semble envisageable alors que les tensions montent entre Alger et Rabat. L'annonce par l'Algérie de la fermeture au 1er novembre dernier du gazoduc principal qui alimentait la péninsule ibérique a pris le gouvernement de Pedro Sánchez à contrepied, à l'arrivée de l'hiver et en pleine escalade des tarifs. En dépit de promesses rassurantes, Alger n'a pas fléchi depuis et maintient le robinet fermé, préférant n'alimenter l'Espagne qu'avec un seul gazoduc de moindre débit plutôt que de réactiver celui passant par le Maroc.
Ne pas interférer avec les plans de Poutine
Les réticences algériennes traduisent des problèmes de voisinage avec les Marocains mais elles s'inscrivent aussi dans le contexte géopolitique plus large de ses relations avec son allié russe. L'Algérie ne souhaite visiblement pas interférer avec les plans de Poutine en facilitant une meilleure arrivée de gaz vers l'Europe par le sud. La politique des blocs passe désormais par les dunes du Sahara.
Cette nouvelle configuration laissait Madrid à la merci de deux voisins incommodes, l'un parce qu'il ne livrait plus de gaz, l'autre parce qu'il menaçait de lever la surveillance des flux migratoires . Faute de pouvoir compter sur Alger, le gouvernement de Pedro Sánchez a finalement décidé de sécuriser son flan marocain. D'autant que la dépendance du gaz algérien a baissé. Il représente 24 % du total des livraisons en Espagne (contre 38 % en 2021) tandis que les arrivées de gaz liquide par méthaniers des Etats-Unis ont monté ces derniers mois jusqu'à représenter 34 % du volume total.
[Source : Par Cécile Thibaud, Les Echos, Paris, 21mar22]
Sáhara Occidental | Western Sahara
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