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Réponse de la Syrie à une lettre adressée au Président du Conseil de sécurité par le Royaume-Uni au sujet de l'acheminement d'une aide humanitaire en Syrie


Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2017/697

Distr. générale
18 août 2017
Français
Original : arabe

Lettre datée du 10 août 2017, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de la République arabe syrienne auprès de l'Organisation des Nations Unies

D'ordre de mon gouvernement, j'ai l'honneur de vous écrire à la suite de la lettre datée du 25 juillet 2017 adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord auprès de l'Organisation des Nations Unies au sujet de l'acheminement d'une aide humanitaire en République arabe syrienne (S/2017/638). Je tiens à vous communiquer à cet égard les faits et renseignements suivants :

  • Premièrement, mon gouvernement n'est pas surpris que la Grande-Bretagne soit déterminée à se livrer à des manœuvres politiques suspectes, dans le contexte des travaux de l'ONU et du Conseil de sécurité ou celui du Groupe international de soutien pour la Syrie. Depuis le début de la crise qui a éclaté dans mon pays, le Gouvernement du Royaume-Uni et d'autres États signataires de l'annexe à la lettre précitée cherchent, par leurs actes, à créer des conditions susceptibles de déclencher une crise humanitaire et à exploiter ensuite les souffrances qui en résultent afin de s'ingérer à des fins purement politiques dans les affaires intérieures de mon pays, ce qui est sans précédent dans les annales des relations politiques internationales, la non-ingérence dans les affaires intérieures étant le fondement de la notion de souveraineté, des principes du droit international et de la Charte des Nations Unies. Ici, je fais spécifiquement allusion aux Gouvernements des pays suivants : Royaume-Uni, France, États-Unis d'Amérique, Arabie saoudite, Qatar et Turquie;
  • Quant au Gouvernement britannique, sa longue histoire de colonialisme dans le monde et la région du Moyen-Orient prouve qu'il n'a cherché, à aucun moment, à promouvoir la stabilité et la sécurité. Qui plus est, sa politique révèle le dédain le plus total à l'égard des principes du droit international et des dispositions de la Charte des Nations Unies et a concouru à créer certains des pires foyers de tension dans le monde, y compris en Palestine, à Chypre, au Cachemire, en Irlande du Nord et en Afrique du Sud. Par ailleurs, il persiste à occuper 10 des 17 territoires non autonomes qui sont à ce jour sous domination étrangère. Il suffit de mentionner la Déclaration Balfour par laquelle les habitants de la Palestine ont été dépossédés de leur territoire, ce qui a entraîné la dispersion et le déplacement de millions d'entre eux, les privant d'un refuge et d'un foyer stables et permanents. Il n'est donc pas surprenant qu'Israël, Puissance occupante, ait octroyé le nom de Balfour à l'une des artères principales de Jérusalem occupée;
  • Avant d'entrer dans les détails, je tiens à appeler l'attention des États Membres de l'ONU sur le fait que beaucoup des États signataires de l'annexe à la lettre précitée ont contribué à exacerber les souffrances du peuple syrien par l'imposition de mesures économiques coercitives unilatérales qui visent divers aspects de la vie des civils, y compris l'accès à l'alimentation, à l'eau, aux soins de santé et aux services de base, qui sont tributaires d'une alimentation en électricité et en chauffage, l'éducation, la liberté de circuler et de voyager et d'investir dans l'agriculture, l'industrie manufacturière et les services. Par ailleurs, la plupart des États signataires de l'annexe à la lettre précitée se sont joints à la « coalition internationale » illégitime dirigée par les États -Unis d'Amérique dont les raids aériens menés en territoire syrien ont fait à ce jour des milliers de morts et de blessés parmi des civils innocents et détruit des dizaines de centrales électriques, de stations et usines de production d'eau, d'installations pétrolières et gazières, de ponts, d'infrastructures, d'habitations et de biens publics et privés, ce qui a entraîné des pertes économiques considérables, estimées à des centaines de milliards de dollars, et porté préjudice à la situation humanitaire dans le pays.
  • Nous parlons donc de ces États qui, par leurs agissements politiques et militaires illégitimes, ont détruit de larges pans de l'économie syrienne et entraîné le déplacement de millions de Syriens, les exposant au risque de périr en mer tandis qu'ils cherchent des moyens de survie et un refuge. Par conséquent, ces gouvernements qui soutiennent le terrorisme en Syrie ou font preuve de complaisance à l'égard de ceux qui le parrainent et ont, à ce jour, déjoué toute tentative de parvenir à une solution politique à la crise ne sont aucunement habilités, sur les plans politique, moral ou juridique, à débattre de questions liées à la situation ou au volet humanitaires.

  • À la suite des allégations erronées et infondées figurant dans l'annexe à la lettre susmentionnée, je demande aux États Membres de se reporter à la lettre en date du 24 juillet 2017 que j'ai adressée au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité au nom de mon gouvernement (S/2017/635) qui y énonçait les observations que lui inspiraient le quarante et unième rapport du Secrétaire général sur l'application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015) et 2332 (2016) du Conseil (S/2017/623). J'appelle également l'attention sur l'allocution que j'ai prononcée au nom de mon gouvernement à la séance du Conseil de sécurité qui s'est tenue le 27 juillet 2017 (S/PV.8015), consacrée à l'exposé mensuel sur la situation humanitaire en République arabe syrienne, fait par la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d'urgence. Je vous en présente les principaux points, réfutant les allégations faites par les États signataires de l'annexe à la lettre (S/2017/638) :
  • La plupart des gouvernements des États signataires de l'annexe à ladite lettre continuent de mettre à profit et d'envenimer les rapports mensuels du Secrétaire général sur la situation humanitaire en République arabe syrienne afin d'exercer des contraintes sur son gouvernement, l'intimider et le dénigrer. La principale raison en est que les auteurs s'obstinent à ce jour, alors que plus de trois ans et demi se sont écoulés depuis la publication du premier rapport, à passer sous silence les obstacles réels à l'accès humanitaire en Syrie, dont les plus importants se présentent comme suit :
  • a) La non-application par les États signataires de l'annexe à la lettre précitée des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment en ce qui concerne le respect de la souveraineté, de l'indépendance et de l'intégrité territoriale de la République arabe syrienne et de la non-ingérence dans ses affaires intérieures;

    b) Les agissements des groupes terroristes armés, principalement le Front Nosra et Daech et les bandes qui leur sont affiliées;

    c) L'imposition par l'Union européenne, les États-Unis et d'autres pays de sanctions économiques coercitives unilatérales au peuple syrien;

    d) Le non-acquittement par les gouvernements des pays donateurs des contributions annoncées : par voie de conséquence, les plans d'intervention humanitaire n'ont été financés qu'à hauteur de 21 %;

    e) Les pays signataires de la lettre ne se sont pas acquittés des obligations que leur impose la résolution 2165 (2014), notamment pour ce qui est de la surveillance des frontières et du mécanisme destiné à superviser le passage des convois d'aide humanitaire à travers la frontière. Les postes frontière servaient encore à l'infiltration d'armes et de terroristes en République arabe syrienne à l'heure de la rédaction de la présente lettre;

    f) La constitution d'une coalition militaire hostile, qui comprend bon nombre de pays signataires de la lettre, qui détruit les infrastructures syriennes et tue des civils innocents, outre la mise en place de bases militaires sur le territoire de la République arabe syrienne sans l'aval de son gouvernement;

    g) L'ingérence persistante néfaste de certains acteurs régionaux et internationaux dans les affaires intérieures syriennes pour parvenir à leurs fins destructrices, prolonger la crise et entraver l'action menée en vue d'un règlement politique pacifique au moyen d'un processus politique mené par les Syriens, sans ingérence étrangère;

  • Les nobles objectifs humanitaires qui doivent être accomplis grâce à l'action humanitaire en Syrie ne peuvent fondamentalement pas l'être tant qu'un partenariat humanitaire véritable n'a pas été établi entre le Gouvernement syrien et l'ONU, dénué de toute considération d'ordre politique. Cependant, l'objectif des rapports mensuels du Secrétaire général a délibérément changé. Au lieu de porter sur les obstacles qui entravent l'accès humanitaire en Syrie de manière à ce qu'ils puissent être surmontés, les rapports sont mis à profit par des États qui sont des membres permanents de ce conseil et d'autres parties qui s'en servent comme moyen de dénigrer le Gouvernement syrien et de lui imposer des contraintes ainsi qu'à ses alliés dans leur guerre contre le terrorisme. Ils aident également à occulter les tentatives d'acheminement de convois d'aide humanitaire à des groupes terroristes armés, au lieu de civils syriens dans le besoin;
  • Le Gouvernement syrien ne ménage aucun effort pour s'acquitter de son devoir qui consiste à améliorer les conditions de vie des civils syriens dans toutes les zones, sans distinction. Les hauts fonctionnaires de l'ONU chargés du volet humanitaire et notamment ceux du Bureau de la coordination des affaires humanitaires ont choisi de rejeter la voie de la coopération et de la collaboration avec le Gouvernement syrien au profit de la logique de l'affrontement, préférant miner la confiance, afin de remettre en cause la crédibilité du Gouvernement en tant que partenaire humanitaire dont la coopération est essentielle pour la mise en œuvre des plans d'intervention;
  • D'après les comptes rendus officiels des réunions, beaucoup de hauts fonctionnaires d'organismes de l'ONU présents sur le terrain en Syrie se sont distancés de la teneur des rapports mensuels du Secrétariat s'agissant des activités de leurs organismes. Ils ont confirmé ne pas avoir fourni d'informations au Bureau et rejeté la façon négative et fragmentée dont elles figuraient dans les rapports mensuels, du fait qu'elles ne reflétaient pas la réalité de leur travail de coordination et de coopération avec le Gouvernement syrien pour ce qui était de l'acheminement d'une aide humanitaire. Ces fonctionnaires internationaux et de l'ONU ont déclaré que les responsables du Bureau cherchaient plutôt à les dresser contre le Gouvernement syrien et qu'ils s'étaient entendus dire qu'ils n'étaient pas tenus d'établir une coordination avec lui pour mener leurs activités. Nul n'est besoin de rappeler que ces propos sont contraires aux obligations du Bureau à l'égard du Gouvernement syrien d'après les résolutions 2139 (2014), 2165 (2014) et 2191 (2014) du Conseil de sécurité définissant les contours de leur rôle en S yrie, qui se confine à la coordination de la distribution de l'aide humanitaire. Ils ne doivent en aucun cas se substituer à l'ONU et aux organismes internationaux qui ont pour mission de distribuer cette aide;
  • Le Gouvernement syrien est désireux de clarifier les faits s'agissant de l'exécution du plan d'acheminement de convois d'aide humanitaire dans les secteurs instables. J'ai adressé nombre de lettres au Secrétariat, au Conseil de sécurité et à l'Office des Nations Unies à Genève comportant des informations détaillées et des chiffres précis sur les convois humanitaires acheminés par les partenaires humanitaires nationaux. Les auteurs du rapport et les représentants du Bureau continuent néanmoins de manipuler ces chiffres afin d'exercer des contraintes sur mon gouvernement et l'intimider. À titre d'exemple, les auteurs du quarante et unième rapport indiquent que seulement deux convois humanitaires ont été dépêchés dans les zones difficiles d'accès depuis avril 2017. Cependant, d'après les faits et les comptes rendus étayés des organisations et des partenaires humanitaires sur le terrain, 48 convois sont arrivés dans ces zones depuis le début de 2017!

Je voudrais dire pour conclure que mon gouvernement ne se laissera pas prendre au jeu politique à peine voilé auquel se livrent les États signataires de la lettre. Il continuera de remplir la mission que lui confère sa constitution à l'égard des habitants de la République arabe syrienne, au moyen d'une coopération avec l'ensemble des partenaires humanitaires en vue de l'acheminement d'une aide à ceux qui en ont réellement besoin dans l'ensemble de la Syrie, de la lutte contre le terrorisme perpétré par Daech, Al-Qaida, le Front Nosra et les personnes, groupes et entités qui leur sont associés, et de l'action menée avec des partenaires internationaux sérieux et crédibles, pour parvenir à une solution politique à la crise grâce à un processus dirigé par les Syriens, sans ingérence néfaste et sans injonctions dangereuses données depuis l'étranger, qui vont à l'encontre des intérêts nationaux véritables de la Syrie et de l'ensemble de ses citoyens.

Le Gouvernement est confiant que la majorité des membres du Conseil de sécurité ne se laisseront pas influencer par les tentatives de certains membres permanents de politiser le volet humanitaire en Syrie. Dans le même temps, il exhorte le Conseil à s'acquitter de ses responsabilités dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales et à prendre les mesures nécessaires pour garantir :

1. L'attachement de tous les États Membres à l'application des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité sur la lutte contre le terrorisme, notamment pour ce qui est de mettre un terme à la fourniture de fonds, d'armes et d'un soutien aux groupes terroristes armés en Syrie;

2. Un engagement de la part de tous les États Membres à s'abstenir de toute pratique ou ingérence néfaste visant à dénaturer la noble action humanitaire et à la mettre à profit pour entraver le processus politique intersyrien facilité par l'ONU afin de résoudre la crise dans le pays d'une manière qui sera décidée par les Syriens eux-mêmes, sans ingérence étrangère;

3. L'adoption d'une position ferme consistant à refuser les mesures économiques coercitives imposées unilatéralement au peuple syrien par certains États Membres;

4. L'adoption d'une position juridique claire à l'égard des atteintes commises par la coalition internationale illégitime dirigée par les États-Unis contre la souveraineté de la République arabe syrienne sous prétexte de combattre Daech, qui consisterait à mettre un terme aux agressions et aux raids lancés par la coalition et les destructions qu'elle occasionne et à faire porter aux États qui y participent la responsabilité, sur les plans politique, moral, légal et matériel, des actes de destruction et des meurtres systématiques commis sur le territoire syrien par leurs forces militaires dans le cadre de cette coalition illégitime.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire distribuer le texte de la présente lettre comme document du Conseil de sécurité.

L'Ambassadeur,
Représentant permanent
(Signé) Bashar Ja'afari


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