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30aoû13


Intervention en Syrie : le Parlement a-t-il son mot à dire ?


Le Parlement britannique vient d'infliger un camouflet sévère au premier ministre David Cameron en désapprouvant, dans la nuit du jeudi 29 au vendredi 30 août, le principe d'une intervention militaire en Syrie. Il n'était pas tenu de respecter le vœu de son Parlement, mais avait annoncé au préalable qu'il suivrait sa décision, ce qu'il a confirmé après le vote. Le tout dans un contexte de méfiance de la part de l'opinion publique, échaudée par l'intervention irakienne de 2003, qui avait été justifiée à l'époque par des "preuves" d'armes chimiques qui s'étaient révélées fausses.

Un tel scénario est-il possible en France ? François Hollande va, lui aussi, consulter le Parlement, le 4 septembre, au sujet de l'intervention. Mais, comme en Grande-Bretagne, ce vote n'a qu'une valeur consultative. Et un refus des députés n'empêcherait pas le chef de l'Etat de tout de même intervenir.

Ce sont les articles 16 et 35 de la Constitution qui définissent les modalités démocratiques d'une intervention armée. Elles sont minimales et dépendent du contexte.

En cas d'urgence

Le chef de l'Etat, également chef des armées, a le pouvoir (article 16 de la Constitution) de "prendre les mesures exigées par les circonstances" en matière d'intégrité du territoire et de respect des "engagements internationaux" de la nation dès lors que celle-ci fait face à une menace "grave et immédiate". Dans ce cas, il doit informer la nation, tandis que le Parlement est nécessairement réuni, et ne peut être dissous. Le président peut ensuite, durant trente jours, exercer des "pouvoirs exceptionnels".

La réforme constitutionnelle de 2008 a ajouté un garde-fou à cet article, critiqué notamment par François Mitterrand (qui ne l'a pas modifié pour autant une fois qu'il a été élu chef de l'Etat) et qui n'a été utilisé qu'une seule fois durant le putsch des généraux, à Alger en 1961 : après trente jours, le président de l'Assemblée, celui du Sénat ou soixante parlementaires peuvent saisir le Conseil constitutionnel d'examiner si les conditions de l'article 16 sont toujours réunies. Le Conseil se réunit aussi au bout de soixante jours d'exercice des pouvoirs exceptionnels.

Hors cas d'urgence

Le Parlement n'a que peu son mot à dire, dans tous les cas. Il doit nécessairement approuver une déclaration de guerre (article 35), mais la France n'a plus déclaré la guerre depuis 1940. Lorsque, comme pour la Syrie, le pays ne fait pas face à un danger imminent et que l'article 16 n'est pas invoqué, le Parlement n'est pas nécessairement impliqué immédiatement. En réalité, avant la révision constitutionnelle de 2008, il n'avait tout simplement pas son mot à dire.

Depuis 2008, l'article 35 a quelque peu renforcé le contrôle parlementaire sur l'emploi de la force armée. Mais ce pouvoir reste limité. S'il doit être informé par le gouvernement de toute intervention des forces armées "au plus tard trois jours après le début de l'information", notamment sur "les objectifs suivis", le Parlement n'a la possibilité ni de les approuver ni de les désapprouver : "Cette information peut donner lieu à un débat qui n'est suivi d'aucun vote", précise le 2e alinéa.

Ce n'est qu'au bout de quatre mois d'intervention que le gouvernement "soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement". Et ce dernier peut, cette fois - en théorie -, refuser de prolonger une intervention. Depuis 2008, l'Assemblée a été consultée deux fois : le 22 septembre 2008 sur l'Afghanistan, et le 28 janvier 2009, où elle a autorisé la prolongation de cinq interventions à la fois (Tchad, République centrafricaine, Liban et Kosovo).

En théorie, le Parlement pourrait désormais refuser la prolongation d'une opération décidée par l'exécutif. Mais le cas ne s'est encore jamais produit.

[Source: Par Samuel Laurent, Le Monde, Paris, 30aoû13]

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