Report by the Special Rapporteur on Torture and Other Cruel,
Inhuman, or Degrading Treatment or Punishment, Theo van Boven


Togo

1743. Par lettre en date du 22 juin 2004, le Rapporteur spécial a informé le Gouvernement qu’il avait reçu des renseignements sur les conditions de détention dans la prison de Lomé. Selon ces informations, la prison accueillerait deux à trois fois plus de détenus que sa capacité ne le permettrait. Dans des cellules de 4 m2, les détenus seraient parfois jusqu’à cinq, et ceux nouvellement arrivés seraient souvent contraints de passer les premières nuits debout. Les détenus comme les gardiens craindraient d’être agressés à tout moment en raison notamment de la présence de malades mentaux pour lesquels aucune autre institution n’existerait. L’accès aux toilettes et aux douches ouverts à la vue de tous serait payant. Seuls un infirmier et une soigneuse seraient présents dans les locaux de la prison qui n’aurait aucun médecin. Les détenus ne recevraient qu’un repas par jour. Des châtiments corporels seraient imposés aux détenus. Décidées par le chef de prison, les sanctions seraient progressives allant de coups infligés à l’aide d’un bâton jusqu’à l’isolement dans deux pièces sans fenêtres, l’une de 1,25 × 1,50 mètre pour la détention, l’autre de 1 × 1 mètre pour y faire ses besoins. Toujours à titre de sanction, les détenus seraient également conduits dans ce qu’ils auraient coutume de nommer « la piscine », et qui serait en fait un lieu d’écoulement des douches et des toilettes, empli d’eau croupie, d’excréments et de tessons de bouteille. La durée des visites serait limitée à 5 minutes, la pratique du sport rigoureusement interdite. Enfin, les nombreux jeunes de 17/18 ans emprisonnés ne seraient pas séparés des adultes. Ils seraient en outre contraints de laver les cellules, accompagner les détenus jusqu’à leurs visiteurs et faire office de ventilateur durant la nuit pour gagner l’argent nécessaire à la couverture de leurs besoins.

1744. Par lettre en date du 22 juin 2004, le Rapporteur spécial, conjointement avec le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a informé le Gouvernement qu’il avait reçu des renseignements selon lesquelles Komi-Koumah Tengué, président du Comité de développement de Dzolo, aurait été arrêté le 7 janvier 2004 à la demande du chef de canton de village pour avoir blessé un jeune homme du village lors d’une prétendue rixe avec celui-ci, et conduit par le brigadier chargé du poste de police de Dzolo au commissariat de Kévé. Selon les renseignements communiqués, cette arrestation aurait pu être motivée par la rancœur supposément nourrie par le chef de canton de village à l’encontre de M. Tengué suite à sa nomination en tant que président du Comité de développement du village. D’après les renseignements transmis, ces comités auraient des compétences et des missions non négligeables, en particulier s’agissant de l’implication de la société civile, et notamment des jeunes villageois dans les travaux communautaires. Le 12 janvier, inquiète du fait que cette affaire n’ait pas été réglée par le chef de village habituellement compétent pour ce type de litige, la famille de Komi-Koumah Tengué aurait demandé que le chef de canton de village reprenne le dossier. Le même jour, elle se serait rendue au commissariat de Kévé où elle aurait été informée du décès de Komi-Koumah Tengué. Les policiers auraient affirmé à la famille que le détenu avait été autorisé à aller puiser de l’eau dans une citerne située dans l’enceinte même du commissariat pour se laver, et qu’il s’était jeté volontairement dans la citerne et noyé, en dépit des efforts de policiers et de passants pour le sauver. Cependant, sa famille aurait constaté un nombre important de blessures sur tout son corps. Son visage aurait été tuméfié, ses testicules sortis de leurs poches, et du sang séché aurait été trouvé sur sa tête. Son cou aurait présenté une extrême raideur, des hémorragies nasales aurait également pu être constatées, sans que n’apparaisse aucun signe venant attester d’un décès par noyade. La famille de Komi-Koumah Tengué aurait alors porté plainte et réclamé une autopsie dont les résultats auraient été rendus publics le 26 janvier 2004. D’après le rapport d’expertise, Komi- Koumah Tengué ne se serait pas noyé et aurait trouvé la mort dans un état de choc aigu. Aucune enquête n’aurait été diligentée sur les causes de sa mort. En outre, le Rapporteur spécial a été informé du fait qu’à ce jour aucun article criminalisant la torture ne figurerait dans le Code pénal togolais.

1745. Les Rapporteurs spéciaux ont également été informés que dans le cadre de ses relations avec l’Union européenne, le Togo aurait pris le 14 avril 2004 un certain nombre d’engagements, et en particulier ceux de garantir à tout moment l’absence d’exécutions extrajudiciaires, de torture, et d’autres actes dégradants sur le territoire togolais, y compris par la formation adéquate des cadres des forces de l’ordre et du système judiciaire (engagement 2.1), de faire sanctionner les responsables de tels actes et d’amender les textes en vigueur si nécessaire (engagement 2.6). Les Rapporteurs spéciaux sauraient gré au Gouvernement du Togo de bien vouloir l’informer de toutes mesures prises en vue de la mise en œuvre desdits engagements.

1746. Par lettre en date du 22 juin 2004, le Rapporteur spécial, conjointement avec le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, a informé le Gouvernement qu’il avait reçu des renseignements selon lesquels 22 militaires et agents des forces de sécurité auraient été arrêtés juste avant l’élection présidentielle du 1er juin 2003 pour leur supposé soutien à Kuma Bitenewe, un colonel de l’armée qui serait entré en dissidence après avoir dénoncé certaines pratiques au sein de l’armée. Ces militaires et agents des forces de sécurité seraient détenus au secret. Il s’agirait des lieutenants Kpandang et Gnadakpo, des capitaines Gnalo, Gnadakpan et Adjinon (camp de Lomé), des sergents-chefs Gnalo, Boboli et Baka, des caporaux en chef Gnamnian, Ouro et Bassiya Yanti Alfa, Malou Karuwe Kossi, des soldats Mensah Yao, Bonfo, Dena Ouhundowa et Kao Kpatolozim, de l’adjudant Bonfo (camp de Lomé), du policier officier Karwe A, du sergent Gnaglo, de Kako Yao, Odin Komlan et Moussa Ganiou.

1747. Par lettre datée du 11 octobre 2004, le Gouvernement a fait savoir aux Rapporteurs spéciaux que le cas des 22 militaires et agents des forces de sécurité relevait du secretdéfense.

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small logo   This report has been published by Equipo Nizkor and Derechos Human Rights on July 27, 2005.