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23mai13
Russie: Une grande armada pour conquérir l'Arctique
D'ici 2030 la Russie doit construire une immense flottille de 2 000 navires, dont 80% desserviront les sites utilisés pour le transport des hydrocarbures du plateau continental russe en Arctique. Le coût de ce projet ambitieux? 2 300 milliards de roubles, soit près de 57,5 milliards d'euros, a déclaré hier le ministre russe de l'Industrie et du Commerce Denis Mantourov. On ignore pour l'instant qui construira ces navires entre les spécialistes russes ou étrangers, écrit jeudi le quotidien Novye Izvestia. Malgré la directive du président russe Vladimir Poutine d'utiliser uniquement les chantiers navals russes, le ministère de l'Industrie et du Commerce n'écarte pas l'éventualité de faire appel à des compétences étrangères.
L'exploitation des hydrocarbures abrités sous les glaces arctiques, qui représentent un quart des réserves mondiales, a été qualifiée d'"axe général" du développement de la Russie par le Kremlin. Le Consortium des constructions navales russes OSK, qui produit actuellement jusqu'à deux tiers des navires civils en Russie, voudrait décrocher les contrats pour la construction de ces navires, ainsi que des plateformes d'exploration et d'exploitation ou encore des navires de prospection séismique. Mardi dernier justement, pendant la conférence sur le développement de l'OSK à Sotchi, Poutine avait qualifié d'inadmissibles les contrats injustifiés auprès des chantiers navals étrangers et avait exigé de donner la priorité aux chantiers russes. Selon lui, ces derniers sont capables de concevoir des produits compétitifs répondant à la demande.
Le ministère de l'Industrie et du Commerce n'est pas du même avis. Des indices laissent à penser que l'OSK n'arrivera pas à remplir cette tâche, sachant qu'il représente 70% des capacités de construction des navires dans le pays. A l'heure actuelle, la part de la Russie dans l'ensemble de la construction navale civile dans le monde représente seulement 1,3% du nombre total des navires. Ces dix dernières années les armateurs russes ont commandé et construit plus de 90% des nouveaux navires à l'étranger.
Selon le ministère, l'industrie russe n'est pas prête pour un défi d'une telle ampleur et suggère de ne laisser à l'OSK que les contrats militaires. Le ministre Mantourov a rappelé que l'OSK avait déjà pris du retard sur près de 30% des contrats du ministère de la Défense et qu'il était pratiquement incapable de construire une immense flottille pour la conquête de l'Arctique. Dans ces circonstances le ministre pense qu'il serait sensé de faire appel aux constructeurs étrangers.
"La construction des navires et des moyens de transports destinés à la conquête de l'Arctique sera très probablement prise en charge par des chantiers navals étrangers qui ont déjà de l'expérience en la matière - notamment en Allemagne et en Finlande", pense Konstantin Makienko, directeur adjoint du Centre d'analyse stratégique et technologique. Actuellement, la Russie ne dispose pas de technologies qui lui permettraient non seulement de construire des navires mais aussi d'extraire le pétrole et le gaz sous la glace, ajoute l'expert Dmitri Abzalov du Centre de conjoncture politique.
Cette "course arctique" coûterait au pays des dizaines de milliards d'euros, compromettant les "constructions du siècle" telles que la voie ferrée Baïkal-Amour (BAM). La Russie est incapable de relever le défi de la conquête du Nord par ses propres moyens, cela nécessite une coopération internationale. Mais même si elle parvenait à trouver l'argent nécessaire, personne ne pourrait garantir que "l'armada arctique" ne servira pas au final de ponton, font remarquer les experts. Si la crise économique mondiale attendue entraînait une chute des tarifs des hydrocarbures, il ne serait plus rentable de les extraire et de les transporter dans les conditions particulièrement difficiles de l'Arctique.
[Source: Ria Novosti, Moscou, 23mai13]
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